Le compagnonnage intègre un nouveau métier depuis peu, celui de vigneron. On connaissait toutes sortes de métiers jusqu’à présent, cuisiniers, charpentiers, tailleurs de pierres, ferronniers, pâtissiers, serruriers… mais le métier de la vogne et du vin y était absent.

Notons au passage, quelques-uns des derniers métiers référencés: soliers moquettistes, carreleurs ou encore jardiniers-paysagistes.

Sur l’initiative d’une viticultrice d’Alsace (Châtenois) et après six années durant lesquelles le projet a mûri et a abouti, il a donc été décidé de faire entrer le métier de vigneron dans le compagnonnage à partir de la fin de cet été 2013, disons à l’époque des vendanges.

Pour les compagnons du devoir d’Alsace, et Yvon Cosmo, son responsable du recrutement, ce métier est dans la droite ligne du compagnonnage, qui leur fera découvrir « voyage, vie en communauté et perfectionnement ».

Et lorsque l’on sait que les trois poncifs du compagnonnage sont canne, couleurs et gourde, on peut penser que la boucle est bouclée !

Quant à Alain Voné, sommelier et président de l’association des sommeliers d’Alsace, il ne manquera pas de nous parler rapidement de cette belle initiative, ainsi que Jean Philippon (Professeur de cuisine à l’Institut Paul Bocuse) l’historien de référence du compagnonnage.

Concrètement, quelques 50 jeunes et aspirants compagnons vont commencer leur tour de France, emblématique du compagnonnage, dès la fin de l’été.

Michel Godet

Le terme « compagnonnage » n’apparaît dans la langue française que vers 1719, pour désigner le temps du stage professionnel qu’un compagnon devait faire chez un maître. « Du latin populaire *companionem, proprement, « celui qui partage le pain avec un autre », de cum, « avec », et panis, « pain ».

Au plan général et humain, il évoque un compagnonnage de vie, un groupement de personnes dont le but est : entraide, protection, éducation, transmission des connaissances entre tous ses membres.

Les légendes compagnonniques font référence à trois fondateurs légendaires: Salomon, Maître Jacques et le père Soubise qui les mettent en scène à l’occasion de la construction du Temple de Salomon, événement censé avoir vu naître l’ordre des compagnons, bien que les textes bibliques qui la décrivent n’en fassent pas mention :

  • La légende salomonienne est particulièrement importante dans les mythes des compagnons du « devoir de liberté ». Elle semble d’origine plus tardive que les autres et semble avoir été introduite à partir du mythe maçonnique d’Hiram dans les chambres des « gavots » et les cayennes des « indiens » entre la fin du xviiie siècle et le début du xixe siècle, avant de s’étendre dans les rituels des autres sociétés compagnonniques.
  • Selon la légende principale, Maître Jacques aurait appris à tailler la pierre étant enfant, avant de partir en voyage à l’âge de 15 ans pour arriver sur le chantier de la construction du Temple de Salomon à l’âge de 36 ans. Devenu maître des tailleurs de pierre, des menuisiers et des maçons, il serait revenu en France en compagnie d’un autre maître, dénommé Soubise, avec lequel il se serait fâché pendant le voyage. Débarqué à Marseille (ville qui en réalité n’existait pas encore), il se serait caché à la Sainte Baume pour se protéger de son rival et y aurait été assassiné, trahi par un de ses fidèles. Ses vêtements auraient alors été partagés entre les différents corps de métiers. Une autre version de la légende, probablement plus tardive, identifie Maître Jacques à Jacques de Molay, dernier grand-maître de l’Ordre du Temple. Une autre encore l’identifie à Jacques Moler, qui aurait été maître d’œuvre de la cathédrale d’Orléans en 1416.
  • Représenté en robe de bure, le père Soubise aurait été selon la légende architecte sur le chantier du Temple de Salomon, où il aurait encadré les charpentiers. Il serait revenu en France par Bordeaux après sa brouille avec Maître Jacques dont il aurait jalousé l’autorité. Selon certaines légendes, il aurait été à l’origine de l’assassinat de celui-ci, alors que d’autres légendes l’en innocentent. Une autre légende encore en fait un moine bénédictin qui aurait participé avec Jacques Moler au chantier d’Orléans.

Une autre légende compagnonnique importante est celle de la séparation des rites. Le mythe compagnonnique la situe en 1401, à l’occasion de la construction des tours de la Cathédrale Sainte-Croix d’Orléans. Les deux maîtres d’œuvre, Jacques Moler et Soubise de Nogent auraient fait face à une grève qui aurait dégénéré en une terrible bataille suivie d’une scission. Il semblerait que cette légende s’appuie sur des faits historiques plus tardifs, à savoir la scission entre compagnons catholiques et protestants et la destruction par ces derniers de la flèche de la cathédrale d’Orléans en 1568.

Les symboles et rituels de la franc-maçonnerie et du compagnonnage sont très différents, bien qu’ils aient quelques éléments communs.

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